Le début du troisième chapitre :

 

Instruction

 

— Ce matin, je vais évoquer la création des livres qui nous lient à l’inexplicable.

Axiam, grand-mage en osmose avec Araya, s’adressait à Comor, fils du roi Ossoto, et à Mori que l’entité s’était choisi pour rejoindre le physique.

Les yeux pétillants d’intérêt, les garçons posèrent le menton sur leur poing dans un même geste.

— Avant-hier, je vous ai parlé des difficultés de Bahass à communier avec les Miobés, vous vous souvenez ?

Ils opinèrent.

— Je vous lis un passage du testament de Râad, le premier grand-mage Araya. Ce récit nous renvoie six mille ans en arrière, à l’époque de la grande évolution. C’est pourquoi il a titré son ouvrage : le renouveau. Grâce à lui, nous connaissons l’histoire de Gahila depuis ses débuts. Cet extrait précède l’invasion des Miobés. Écoutez bien : « Sur d’autres mondes aujourd’hui détruits, Bahass avait vu des hommes échanger entre eux en écrivant sur la matière. Elle insuffla cette idée à l’un de ces carnassiers qui se mit aussitôt au travail. Il bâtit un livre et le nomma “Force”, car il en ressentait un puissant appétit de conquête. Bahass avait communiqué de cette manière par le passé, elle savait donc former les mots sur ce genre de support. Dans le sommeil, l’élu assimila les signes premiers ».

Comor bondit de sa chaise.

 La Force est née avant le Pacte ?

— Oui. Araya est arrivée après sa rivale qui avait déjà commencé son œuvre de destruction à travers le peuple miobé.

Axiam tourna quelques pages.

— Voici ce que dit Râad à ce propos : « L’exceptionnelle réceptivité spirituelle des Sharzacs intéressa Araya. Elle chercha le meilleur d’entre eux et découvrit Satoumh. Il relia à son tour des feuilles avec le lin qui servait à confectionner les vêtements des habitants de son village et Araya y inscrivit des messages. Le vieillard apprit à les interpréter et baptisa le livre “Pacte”, car il en émanait un fort désir d’alliance entre l’entité et cette tribu métissée qu’Arzacs et Herriens avaient créée au fil de leurs amours. Grâce aux instructions, il enseigna la télékinésie, l’art de chasser les nuages ou déclencher la pluie pour combattre l’ennemi, et guérir les blessés de cette cruelle invasion ».

— Satoumh fut le premier grand-mage.

— Le premier mage tout court, jeune Promis. Avant l’instauration d’une telle hiérarchie, Araya s’est trouvé un sympathisant au sein de chaque ethnie. Cependant, les Arzacs sont exclus de ce cercle vertueux.

— Pourquoi ?

— Elle n’a pas réussi à entrer en contact avec eux.

— Voilà la raison de tes nombreux déplacements, comprit Mori. Tu es le mage des Herriens et aussi celui des Arzacs. Tu joues double rôle.

 

— On peut le formuler ainsi, rit Axiam.